Honor de Cavalleria / Le mythe, l'imagination

Antoine Glémain : A propos des résonances actuelles, j'ai été très sensible à la qualité de l'adaptation, c'est quelque chose qui me touche beaucoup. Ce qui fait à mes yeux la résonance du film, ce n'est pas ce qu'il y a de narratif, c'est que c'est un roman moderne. Il y a un aspect du film qui tient au mythe. Immédiatement, on sait qui est Don Quichotte et qui est Sancho. Il y a tout un ensemble de fragments de récits qui sont déjà autour qui ne sont d'ailleurs pas présents de manière folklorique du tout dans le film. Le film est tout de suite dans une dimension mythique à partir de quoi l'imagination peut se déclencher.

L'autre aspect des choses, c'est que dans le roman de Cervantès, la narration est déconstruite. Don Quichotte n'existe pas seulement parce qu'il a lu des romans de Chevalerie. Dans la deuxième partie, le roman se boucle sur lui-même puisqu’il revient sur d'autres récits apocryphes qu'il se met à critiquer. Il y a une dimension réflexive du personnage, moi c'est ça qui m'a le plus ému, on est à la fois dans la nature et absolument dans le réflexif tout le temps, c'est un univers mental et en même temps sensuel.

Albert Serra : C'est difficile d'interpréter, parce que chaque époque a eu sa propre interprétation, le romantisme a interprété Don Quichotte comme un grand romantique dressé contre le monde avec un grand idéal. Ensuite on l'a interprété comme un petit fou, stupide, caricatural. Chaque époque fait une interprétation différente du livre, en contradiction avec la précédente. Je ne sais pas si Cervantès se moque du personnage de Don Quichotte ou s’il est lui-même un grand idéaliste. Je voulais garder cette ambiguïté. Toutes les interprétations sont justes, c'est important parce que c'est un film très ouvert. Comme le livre.

Le raisonnement de l‘action
Honor de Cavalleria

Saison I • épisode 1

20 janvier 2007 à Angers
au cinéma Les 400 coups
et au Centre de Congrès,
dans le cadre du festival Premiers Plans